Les réseaux sociaux changent la démocratie en profondeur

Article entier disponible sur le site de l'express. Avec sa technologie d'inférence sociale et sémantique, Bloom analyse en continu les conversations sur Facebook, TikTok, Twitter et les autres plateformes de la planète. Son PDG décrypte leur influence phénoménale sur nos vies quotidiennes... et notre vie politique.

Les réseaux sociaux changent la démocratie en profondeur

Il s’efforce d’identifier nos sujets de préoccupation, guette les nouvelles habitudes de consommation et surveille les poussées de fièvre qui agitent la Toile. Bruno Breton est l’un des meilleurs connaisseurs du « digital media ». Fondateur de la start-up Bloom, une plate-forme dédiée à « l’analyse qualitative, prédictive et stratégique » des réseaux sociaux, il vient de franchir une étape importante en levant 11 millions d’euros auprès d’un groupe d’investisseurs, parmi lesquels le géant Dassault Systèmes. Lui qui assure avoir détecté la colère sociale plusieurs mois avant les gilets jaunes met en garde nos responsables politiques : pour ceux qui refusent de comprendre ce qui se joue sur le Web et l’émergence d’une démocratie plus « horizontale », « le combat est perdu d’avance ».

L’Express : L’actualité des dernières semaines a été rythmée par les polémiques en série autour de Facebook, accusé de laisser prospérer les messages haineux et les fake news en tous genres. Vous qui, avec Bloom, naviguez continuellement sur les réseaux sociaux, avez-vous le sentiment de baigner dans les ondes négatives, les passions mauvaises ?

Bruno Breton On peut avoir ce sentiment, lorsqu’on se limite à Twitter, qui est un outil très prisé des militants, tombant volontiers dans l’exagération, l’invective ou les propos sans nuance. Mais la bonne surprise, lorsqu’on analyse plus largement les conversations, sur l’ensemble des réseaux sociaux, c’est que 97 % des contenus sont simplement des échanges au sein des familles, entre amis, ou d’ordre professionnel… Il y a une soif d’information, de compréhension et d’échanges, de socialisation, qui est absolument énorme. Plus de 80 % des utilisateurs n’ont aucun lien avec des influenceurs et génèrent des milliards de contenus à travers la planète, très majoritairement bienveillants et positifs. Ce n’est absolument pas le torrent de haine qu’on imagine.

On a donc tort de vouloir réguler les réseaux sociaux ?

Tout dépend de ce qu’on entend par régulation. Pendant plus de dix ans, après la naissance de Facebook en 2004, les élites du monde entier ont laissé se déployer les réseaux sociaux américains sans rien faire, en Europe en particulier. Elles ont réalisé un peu tard qu’un véritable contre-pouvoir était en train d’émerger et s’efforcent aujourd’hui de le réguler sur le terrain normatif et réglementaire, à travers le règlement général de protection des données (RGPD) par exemple.

Mais cette réponse n’est pas suffisante. La seule façon de neutraliser la puissance d’un groupe comme Facebook, c’est la concurrence. C’est pour cette raison que Mark Zuckerberg s’est empressé de racheter Instagram et WhatsApp quand il les a vus émerger. Il a compris la menace et consolidé sa position dominante sur le marché en les absorbant. La vraie faille de Facebook se trouve là : on ne peut pas exclure qu’un jour les utilisateurs, et en premier lieu les marques, qui représentent 98 % de son chiffre d’affaires, se détournent et lui préfèrent une autre plateforme. Les jeunes ont commencé à le faire massivement. De ce point de vue, la montée en puissance de TikTok ces deux dernières années est devenue un vrai sujet de préoccupation pour Facebook : les taux d’engagement [NDLR : qui mesurent les interactions des utilisateurs d’un réseau social] y sont des dizaines de fois plus élevés qu’ailleurs.

D’une plateforme à l’autre, voyez-vous se dessiner des profils-types d’utilisateurs, des caractéristiques sociologiques spécifiques ?

Oui, et il est d’ailleurs essentiel de connaître ces caractéristiques sociodémographiques si l’on veut comprendre ce qui se joue sur les réseaux sociaux, détecter les signaux faibles, les crises en germe dans la population. Aujourd’hui, nos outils nous permettent de suivre …..

L’article est disponible sur le site de l’express : https://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/bruno-breton-pdg-de-bloom-les-reseaux-sociaux-changent-la-democratie-en-profondeur_2163188.html

Propos recueillis par Eric Chol et Pascal Pogam Publié le 30/11/2021 à 19:50 disponible sur le site de l'express