« Emmerder les non-vaccinés »: les propos de Macron ont-ils mis le feu aux réseaux sociaux ?

Pour L'Express, Bloom a accepté d'analyser les réactions suscitées par la petite phrase du chef de l'Etat sur Twitter, Facebook et les autres plateformes.

Avec ses outils « d’analyse qualitative, prédictive et stratégique », la plateforme Bloom avait détecté la colère sur les réseaux sociaux plusieurs mois avant les gilets jaunes. Après les annonces présidentielles du 12 juillet, elle avait également perçu qu’en dehors de la frange la plus militante des antivax, l’extension du passe sanitaire ne suscitait pas réellement de réactions hostiles au sein de la population, ce qui s’est confirmé par la suite… Face à la levée de boucliers provoquée la semaine passée par les propos du chef de l’Etat sur les non-vaccinés, il était donc tentant de solliciter cette start-up française, pour savoir si cette séquence avait généré une activité inhabituelle sur les réseaux, et si l’interview d’Emmanuel Macron avait engendré une poussée de fièvre dans le pays tout entier.

Pour L’Express, les équipes de Bloom ont accepté de passer au crible les conversations, interactions, commentaires et publications en lien avec la fameuse interview du Parisien. La collecte des informations a été réalisée entre le 4 et le 5 janvier. Pendant ces deux jours, la société a pris le pouls de Facebook, Twitter, Youtube, Instagram, TikTok ainsi que des « sites et blogs associés », en tentant d’identifier les principaux ressorts de la polémique, de mesurer l’ampleur de la secousse et sa portée éventuelle, à trois mois de l’élection présidentielle.

Plusieurs facteurs ont été pris en considération, comme le nombre d’utilisateurs actifs uniques, au sein des différentes communautés, ou les taux d’engagement (NDLR : mesurant les interactions des utilisateurs d’un réseau social) générés par les publications concernées. Premier enseignement de cette étude : « Les déclarations d’Emmanuel Macron n’ont mobilisé qu’une fraction des réseaux sociaux, laissant de côté les citoyens ordinaires peu polarisés », constatent les experts de Bloom. Le pic du débat s’est articulé principalement sur Twitter, autour des prises de parole médiatiques et politiques, sans que la conversation ne « décolle » par la suite, que ce soit parmi le grand public non-militant, ou sur les autres plateformes. En d’autres termes, cette poussée de fièvre est restée circonscrite au cercle politique et a principalement agité la sphère médiatique. « Le grand public, lui, semble un peu spectateur de la situation », décrypte Aurélie David, vice-présidente et directrice du data consulting chez Bloom, qui souligne que pendant les deux jours analysés, les pics d’activité ont systématiquement été générés par des politiques et des figures du mouvement antivax. Parmi les plus mobilisés, la droite de la droite avec diverses sensibilités représentées (Florian Philippot, Nicolas Dupont-Aignan, Eric Zemmour dans une moindre mesure).

Pour ces opposants, il s’agissait avant tout d’instrumentaliser la séquence à des fins politiques, en critiquant la stratégie vaccinale de l’exécutif et en manifestant de façon virulente leur « anti-macronisme ».

Au sein de cette population, la « vulgarité » des propos tenus par Emmanuel Macron suscite moins de réactions qu’attendu : le terme « emmerde », isolé par les équipes de Bloom, « se situe en périphérie des conversations, ce qui montre qu’il n’est pas le principal levier de critique envers le président de la République et n’est qu’un prétexte pour attaquer le gouvernement ».

Les analyses réalisées permettent d’observer une rapide accélération, puis la stabilité de l’activité à un niveau très haut pendant 48 heures, mais qu’il convient de relativiser : au total, plus des 2,2 millions « d’acteurs actifs » se sont mobilisés sur le sujet dans les réseaux sociaux ; à titre de comparaison, plus de quatre millions de personnes actives avaient été comptabilisées après l’annonce de l’été sur le passe sanitaire. « Les problématiques des citoyens sont axées sur des sujets de fond comme le pouvoir d’achat ou l’environnement. Ces emballements sont très instrumentalisés par les politiques et les médias et de plus en plus éloignés du quotidien des Français, observe Aurélie David. Certes les citoyens anti-Macron vont prendre la balle au bond, mais les propos du président restent loin des préoccupations des Français. »

 

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